Il a écrit le plus célèbre des messages mais son nom et son visage étaient peu connus du grand-public. Edward Flectcher, plus connu sous le pseudo « Duke Bootee », écrivait le texte de « The Message » de Grandmaster Flash en 1982.
Edward Fletcher faisait parti de l’équipe d’origine du label « Sugarhill Records ». Le groupe maison est alors composé de Doug Wimbish (bass), Skip Alexander (guitare) et de Jiggs Chase (claviers). C’est ce dernier qui recrute Fletcher chez « Sugarhill ».
En 1980, Duke Bootee écrit un texte très imagé sur la dureté de la vie en centre-ville et sur les luttes des populations pour survivre dans ces lieux. Le texte est alors intitulé « The Jungle ». « It’s like a jungle sometimes, it makes me wonder how I keep from going under » sera connue de plusieurs générations et partout sur la planète. Chuck D., leader du groupe « Public Enemy » dira : « ce fut un énorme choc qui changea ma vie. Le plus grand groupe du moment avec le plus grand M.C. du moment avec des textes qui avaient du sens ». Pour « Questlove » des « Roots » : « The Message nous a mis à l’envers ! En 1982, le rap est connu pour son côté festif et dansant. Ce titre a marqué un virage à 180° et il a prouvé que le rap pouvait transmettre des messages sociaux et politiques ». Ensuite, il écrira encore pour Grandmaster Flash, le texte de « New-York, New-York » notamment.
Pourtant, lorsque « Bootee » présente la démo, personne n’en veut. Grandmaster Flash trouve que ça ne sonne pas assez club. Il faudra toute la persuasion de Sylvia Robinson pour le convaincre, lui et les « Furious 5 », d’enregistrer ce titre. Elle persuade le rapper Melle Mel d’ajouter quelques strophes au texte initial. Fletcher a déjà écrit « The Bill collectors they ring my phone / and scare my wife when I’m not at home / got a bum education, double-digit inflation / Can’t take the train to the job, there’a strike at the station ».
En 1982, « The Message » change la face du rap, de la culture hip-hop et du rock en général. Le hip-hop devient un média de revendications sociales, politiques et économiques. KRS 1, Chuck D, Rakim et d’autres suivront la même voie.
En 1984, Duke Bootee enregistrait son album solo intitulé « Bust Me Out ». L’année suivante, il créait « Beauty And The Beat records », son label. En 1985, il participait au projet « Sun City » mis en place par Arthur Baker. Un titre contre l’apartheid avec Melle Mel et de nombreux artistes. Plus tard, il écrira, produira ou mixera des titres pour Snoop Dog, Ice Cube, P.Diddy, Dr John et Bill Wyman.
En 1992, le roi Miles Davis enregistrait « Duke Booty » sur son album « Doo-Bop », le dernier. Un mélange de jazz et hip-hop, hommage d’un maitre à un autre.
Après ces années d’implication dans l’écriture de rap, Fletcher se retire et se tourne vers l’enseignement. Il officie en université et lycée. Depuis 2007, il vivait à Savannah en Georgie. Même s’il a bien vécu grâce aux droits d’auteurs de « The Message » repris, samplé et diffusé un nombre incalculable de fois pendant 25 ans, il n’a jamais eu la reconnaissance méritée.
Si ce titre donne encore des frissons à des millions de personnes aujourd’hui, c’est grâce à la voix de Melle Mel, à la qualité de la production et surtout à la portée du texte. Il décède le 13 janvier 2021. Il avait 69 ans.