Agressive, provocante, indécente, Betty Davis l’était dans son attitude, incontestablement. Sa musique en était le reflet : un funk pur, africanisé, sans fioritures.
Avec Miles
L’artiste n’a pas enregistré énormément d’albums : quatre entre 1973 et 1996 dont trois sont considérés comme majeurs. Elle n’était certainement pas là pour faire de la figuration. Non, Betty Davis s’est impliquée activement dans toutes ses entreprises. Et son nom est associé aux plus grands musiciens masculins de l’époque de Jimi Hendrix à Sly Stone en passant par Miles Davis.
Pour ses musiciens, elle avait recruté les meilleurs, à commencer par Larry Graham (bass), Greg Errico (batterie), deux anciens du Sly & the family stone. À cette base rythmique s’ajoutaient quelques pointures de l’époque telles Neal Schon et Douglas Rodriguez (deux guitaristes du groupe de Santana) et Merl Saunders (claviers). La bass de Larry Graham était l’élément central de sa musique. Le « groove« , le son «sale » et groovy, funk à souhait, revenait à Graham. Ensuite, la partie rock était confiée aux guitaristes. Cette partie rock que Miles Davis explorera grâce à elle pour changer de direction artistique, pour durer également. Miles enregistre « In A Silent Way » et « Bitches Brew » pendant sa liaison avec elle.
Betty Marbry, son vrai nom, était née en Caroline du Nord, USA. Elle grandit à Pittsburgh avant de s’installer à New-York au début des années 1960. Là, elle fréquente les clubs branchés et se fait doucement un nom. En 1964, elle sort son premier single. Elle est également créditée sur le titre « Uptown » des Chambers Brothers. Elle n’a pas vingt ans.
1968 est l’année de sa rencontre avec Miles Davis. Avant la fin de l’été, ils sont mari et femme. L’union sera courte mais suffisamment longue pour changer la carrière du trompettiste. Elle l’emmène dans les milieux rock psyché et change radicalement sa garde-robe. Sur la pochette de l’album « Filles De Kilimanjaro » de Miles, c’est elle. Il écrit aussi « Mademoiselle Mabry » pour elle. Divorce en 1969. Betty quitte Miles pour Jimi Hendrix. Le trompettiste dira qu’elle était trop jeune et trop sauvage pour lui.
Betty et les scandales
Au début des années 1970, elle s’attèle sérieusement à la tâche. Il s’agit de composer un album. Greg Errico et Larry Graham, Michael Carabello, les Pointer Sisters et des membres de Tower Of Power sont convoqués en studio. Finalement, un premier album est commercialisé en 1973. Impact commercial très faible. Normal, l’album est bourré d’innovations et de chansons soit trop avant-gardistes, soit bien trop provocantes pour l’adhésion du plus grand nombre. Indécence et attitude bien trop suggestive provoque une réaction négative de l’église. Des groupes religieux intégristes manifestent à presque tous ses concerts. Les radios refusent de diffuser ses textes. Il en ira de même pour les suivants. Son rapport au sexe rend inaudible le reste. Le disco arrive et elle disparait de la scène musicale. Elle aurait pourtant été une superbe diva disco.
Avec le temps va…
Avec le recul et les changements de mœurs, un autre public découvre la richesse et la force de sa musique. Les terribles lignes de bass, les riffs de guitares électriques, les cuivres, cette voix de lionne qui fera les belles heures de Tina Turner, tout cela prend le dessus sur les propos sexuels et la provocation. Le groove et seulement le groove donne une seconde jeunesse à ses trois premiers albums réédités dans les années 1990.
En 2017, le documentaire « Betty : they say I’m different » consacré à sa vie et son œuvre la remet en pleine lumière. Elle entre de nouveau en studio et une chanson voit le jour en 2019 : « A Little Bit Hot Tonight ». La première en quarante ans ! sa dernière. Elle décède le 9 février 2022. Elle avait 77 ans.
Discographie Sélective
Betty Davis (1973, MPC Limited)*** Acheter
They Say I’m Different (1974, MPC Limited)*** Acheter
Nasty Gal (1975, MPC Limited)*** Acheter
Crashin’ From Passion (1996, ZYX)** Acheter